BD

Au tout début il y a le dessin.

Comme un continent. À perte de vue, proprement infini.

Vasteland.

Plusieurs séquences inaugurales.

J’en dénombre trois.

Première séquence : à 5 ans, mon père m’achète deux livres, il s’agit de deux BD : Asterix et Cléopâtre, de Goscinny et Uderzo et des Collines Noires, de Morris. L’irruption, dans mon univers de gribouillages que je produis sans cesse, de deux exemplaires de ces petits réceptacles à dessins que sont les albums de BD a été, je le pense, décisif. J’ai peu de souvenirs de ma prime enfance mais celui-là émerge comme le plus précis, le plus vif. Il se détache par sa netteté : je revois la scène, le canapé, l’éclairage et tout le décor du salon qui entoure l’ouverture du premier album. L’émotion alors ressentie, le choc de la découverte, se manifeste encore en moi, lorsque j’y repense, presque de l’extérieur. Je me remémore la séquence, comme dans un film super 8 que je pourrais être en train de revisionner s’il avait été tourné. Il ne s’est pourtant gravé que sur le bromure de ma mémoire. Comme une image-fantôme. Et ce souvenir n’en est que plus fondateur.

Je n’ai jamais vu encore de véritable peinture et, d’autre part, je ne sais pas ce que sont les bandes-dessinées. Je possède juste deux livres. Comment ces dessins se retrouvent-ils ainsi assemblés en une suite cohérente ? Que représente cet ensemble de vignettes, ce cartel de petits tableaux indépendants et néanmoins liés par un fil dont je perçois l’importance, l’absolue prédominance, mais que je ne peux pas encore pénétrer faute de savoir lire ? Irruption du récit ? Suffit-il de mettre à la suite plusieurs dessins pour créer cette narration ? Mais, par ailleurs, par quel processus un récit peut-il s’instaurer à l’intérieur d’une image unique ? A-t’on besoin de mots, de texte, pour donner du sens ? A-t’on toujours besoin de sens, d’ailleurs ? Et que signifie lire lorsqu’on ne fait encore que regarder ?

J’écris tout cela sur le mur.

Toute la problématique, que ce soit en bande-dessinée ou en peinture, est alors posée.

Autant de questions qui, sans qu’évidement je le perçoive, commencent à s’empiler.

 

 

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